vendredi 6 octobre 2017

Le phénomène Philomène



Juliette et Anatole sont en 3ème. Anatole est un drôle de zig, une sorte de Grand Duduche souvent dans la lune. Autant dire que si son prénom rime avec école, c’est bien la seule chose qui s’accorde, entre le collège et lui. Plutôt solitaire, plutôt du genre à passer ses récréations assis sur un banc à lire ses mangas, il n’a pas beaucoup d’ami.e.s, en dehors de Juliette, qui est peut-être un peu plus qu’une copine pour lui. Mais il n’est pas encore au courant. Juliette, si, et c’est elle la narratrice.

La vie d’Anatole va changer du jour où il découvre, assise en classe à côté de lui, là où il n’y a jamais personne, une certaine Philomène, qu’il n’a jamais vue. Non seulement c’est une nouvelle, mais il comprend vite que si elle lui parle et qu’il lui répond, il est le seul à l’entendre et à la voir. Pour la bonne et simple raison que Philomène est un fantôme, celui d’une jeune fille morte en 1870 sur les lieux de l’actuel collège.
Dans la littérature comme dans la vie, le fantôme incarne toujours un tourment du passé qui n’a pas su trouver l’apaisement et le cherche désespérément parmi les vivants. Cette incarnation est plus ou moins forte. Dans le cas de Philomène, c’est un vrai phénomène, qui va entraîner Anatole dans une drôle d’aventure, le sortant assez violemment de son monde de rêverie permanente.

Que cherche Philomène ? C’est tout ce que le roman d’Emmanuelle Cosso nous amène à découvrir progressivement à travers le récit de Juliette. Fantôme du passé, Philomène fait revenir Anatole dans le Paris de 1870, assiégé et affamé par les Prussiens. Où Anatole croise Sœur Charlotte, enseignante fantôme elle aussi d’une classe non moins fantôme tapie dans les sous-sols du collège… En l’entraînant jusqu’au cœur d’un drame irrésolu, Philomène va se servir d’Anatole pour se libérer de ses chaînes – tout fantôme a les siennes, c’est bien connu.

Heureux les cœurs purs, ils verront les âmes enchaînées pourrait être la leçon du Phénomène Philomène. Emmanuelle Cosso impose sa fantaisie dans cette fable réaliste et improbable, où l’on croise aussi la police, les Pompiers de Paris et la Garde républicaine.

Vous allez me dire que les fantômes, ça n’existe pas ? Pour ma part, je n’ai jamais rencontré de Philomène. Mais je crois au fantôme tel que l’ont défini les psychanalystes Torok et Abraham : le fantôme, c’est "le travail dans l’inconscient du secret inavouable d’un autre". Songez à tout ce qui vous travaille et vous commencerez peut-être à ressentir vos fantômes intimes, sinon à les voir comme Anatole.

Le phénomène Philomène - Emmanuelle Cosso - éditions Sarbacane, collection Pépix (à partir de 8 ans, 256 pages, 10,90 €)

En podcast sur RCF 45 (écoutez un extrait à 2:31)

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