vendredi 30 juin 2017

Simon & Louise



Bientôt l’été, les vacances. A ne voir que les beaux jours et la liberté retrouvée, on pourrait oublier que pour beaucoup, c’est aussi le signal de la séparation. Rendez-vous à la rentrée se dit-on comme pour en conjurer les effets redoutés.

« Deux mois de vacances, pff, ça va être long » soupire d’ailleurs Simon en regardant le selfie qu’il vient de faire avec son amie Louise, à la sortie du collège. Max de Radiguès, scénariste et illustrateur de Simon & Louise a eu l’idée de nous faire passer ces deux mois de séparation successivement en compagnie de Simon puis de Louise, dessinant leurs étés parallèles sur 125 pages.

Simon est à peine parti en vacances avec sa mère qu’il s’aperçoit soudain que Louise vient de changer dans  Facebook sa « situation amoureuse », passant brutalement de « en couple » à « célibataire ». Il se demande immédiatement ce que cache ce revirement de Louise à son égard, essaie de la joindre, laisse des messages mais n’obtient aucune explication satisfaisante. Sur un  coup de tête, il décide de rejoindre son amie à Montpellier, à 520 km de là, avec son sac à dos, un peu d’argent et son portable. Il laisse à sa mère un petit mensonge plausible pour la rassurer. Dans ce qui ressemble à une fugue, Simon va découvrir la route,  l’auto-stop, ses aventures et ses dangers, les rencontres bonnes et les mauvaises. Retrouvera-t-il Louise au terme de son voyage ? En tout cas, en se perdant à plusieurs reprises, en inventant quelques mensonges au gré des rencontres qu’il fait, lui qui s’est improvisé petit routard, il va se trouver lui-même.

Pendant ce temps, Louise est à la plage en compagnie de sa cousine Manon, une fille plus entreprenante qu’elle, bien décidée à rencontrer « les beaux mecs de la plage », comme elle l’annonce à Louise avec la forfanterie de son âge. Sitôt dit, sitôt fait. Manon, qui ne doute de rien, accoste Quentin, dans lequel Louise s’est cogné peu avant sous l’eau, et son copain nommé Luca : on se retrouvera au cinéma en plein air où tout le monde se rend en famille le soir même. Avant la fin du film, garçons et filles s’éclipsent. Louise et Manon sont invitées à rejoindre les deux copains qui squattent une cabane dans les arbres. Là, les garçons se font plus entreprenants. Comment disait-on autrefois ? On flirte. Mais Louise fait de la résistance. Quentin lui plait, mais elle a toujours Simon en tête et finalement, elle n’a pas très envie de se faire peloter à la sauvette. Elle casse, comme on dit, et manque aussi de se casser du haut de l’arbre. Les jours suivants, ils vont quand même se revoir, car les quatre ados n’ont pas grand-chose de mieux à faire. Louise fait aussi connaissance avec Arthur, un garçon en apparence plus timide qui s’accroche à leur petit groupe bien qu’il soit un peu le souffre-douleur de Quentin et Luca. Louise va découvrir le secret d’Arthur et jouer un bon tour aux deux autres garçons.

Max de Radiguès nous promène dans ces vacances parallèles  de Simon et Louise en prenant son temps. Pour cela, il l’étire, puisque si l’on s’en tient à l’action qu’il décrit, ce sont deux jours et une nuit qu’il nous raconte. Ses images nous entraînent dans les rêves et les émois des deux adolescents, les suggèrent d’un trait clair aussi économe qu’expressif. Il y a des cases, des planches entières, sans paroles ou presque, où se lisent les élans et les peurs silencieux, les envies et les réticences des deux collégiens à l’épreuve de leurs libertés naissantes, conquises. Pour Simon qui traverse une partie de la France c’est le vert d’une campagne vallonnée qui domine, jusqu’à ce qu’il parvienne à Montpellier. L’été en apnée de Louise alterne la plage, la plongée sous-marine et les virées nocturnes plus ou moins sous contrôle des parents.


Comme chacun sait, les parallèles pourraient finir par se rejoindre. Max de Radiguès nous montre Simon errant dans Montpellier où il est enfin arrivé. Il commence par s’en remettre au hasard des rues pour retrouver Louise. Mais quand il va tomber sur son amie, il va aussi tomber sur un os. Notre auteur refilme en quelque sorte la même situation au même moment et au même endroit, vue du point de vue de Louise cette fois. Les deux amis vont-ils se revoir ou devront-ils attendre la rentrée des classes  ? Et en auront-ils encore envie après avoir grandi séparément tout l’été ?

Simon & Louise (BD) - Max de Radiguès - Sarbacane (125 pages, 18,50 €)

En podcast sur RCF Loiret :


vendredi 23 juin 2017

De l'autre côté

Quatre saisons dans la campagne suédoise 



Peut-être l’avez-vous remarqué ? Mes chroniques sont assez chauvines. Je ne parle quasiment jamais d’auteurs étrangers. Considérant que nous sommes suffisamment colonisés par la littérature anglo-saxonne, je ne vais pas de surcroît en assurer la promotion ! Toutefois, une règle n’est vraiment tenable que si elle souffre quelques exceptions.

Aussi vais-je vous parler aujourd’hui d’un auteur nordique, Stefan Casta  et surtout de son livre intitulé De l’autre côté. Je vous signale que Stefan Casta a reçu en 2002 le prestigieux prix Astrid Lindgren pour l’ensemble de son œuvre. De l’autre côté a été traduit du suédois par Agneta Ségol. Les traductrices et traducteurs sont une autre raison de faire une entorse à mon patriotisme culturel. Leur rôle de passeur reste vital pour tous ceux que Babel a cantonnés à leur langue maternelle.

Le livre de Casta commence comme Les choses de la vie, le film de Claude Sautet : par un accident de voiture, minutieusement décrit, au ralenti, et qui a pour témoin insolite… un renard. A l’arrière, Elina, la narratrice, en décompose toutes les phases, filmées à 360°.

Au final, elle s’en sort miraculeusement indemne. Jörgen aussi. Jörgen, c’est son père, qui conduisait et qui est en grande partie responsable du carambolage. Mais sur le siège passager avant, « quelqu’un meurt » : ce sont les premiers mots du livre. La vie des deux survivants va s’en trouver singulièrement changée.

Vanessa, la morte, n’était pas la mère d’Elina mais la nouvelle compagne de son père. Mais au fond, Elina aurait eu moins de peine si ça mère biologique était morte. Avec la mort de Vanessa, quelque chose s’évide dans les existences d’Elina et de son père. Quand la vie reprend ses droits, ce tiers manquant flotte à tout moment dans l’appartement et pour Elina, c’est parfois bien plus qu’un souvenir : Vanessa est devenue pour elle une présence réelle qu’elle peut nous décrire, une projection holographique de l’au-delà avec qui elle s’entretient comme si elle était encore en vie.
Quand Jörgen et Elina décident de quitter la ville et d’acheter une maison à la campagne, Vanessa va hésiter à les suivre.

Le roman de Stefan Casta s’étend d’un été à l’autre, au fil des quatre saisons qui rythment le deuil surmonté. La nouvelle maison va s’imposer lentement comme un personnage à part entière et autour d’elle, une nature très présente, dont nos héros semblent découvrir pour la première fois les métamorphoses. Est-ce le même renard entraperçu au moment de l’accident qu’Elina recroise dans la forêt enneigée ? Un jeune et beau voisin, prénommé Aron, rôde aussi dans les parages, apparaissant et disparaissant comme un vagabond sans attaches. On devine bientôt que quelque chose le relie à l’histoire de la maison, sans qu’on sache quoi. Va-t-il prendre une place dans le cœur d’Elina ?

L’adolescente est progressivement partagée entre la ville, l’école, son amie iranienne Marjan et cette vie nouvelle au cœur de la nature où elle et Jörgen reprennent leurs marques. Jörgen s’essaie à plusieurs activités, sous le regard parfois inquiet, mais toujours indulgent, de sa fille, que son père ne cesse de surprendre et auquel elle doit sans cesse ajuster sa propre existence.


Il y a un charme particulier dans ce livre, indéfinissable et pourtant puissant. L’auteur introduit dans le décor et dans la vie quotidienne de ses héros des touches de mystère, des voix extérieures, des questions laissées provisoirement sans réponse, qui tiennent la curiosité du lecteur en alerte. Peu à peu, le regard précis et bienveillant d’Elina sur toutes choses nous enveloppe et ne nous lâche plus.

De l'autre côté - Stéfan Casta (traduit du suédois par Agneta Ségol) - éditions Thierry Magnier (385 pages, 17 €)

En podcast sur RCF Loiret (écoutez un extrait à 3:35) :

vendredi 16 juin 2017

Guingouin, un chef du maquis


Au mois d’avril 2017, j’ai eu le plaisir de croiser Yann Fastier, auteur, illustrateur et même éditeur, au salon du livre de Saujon, en Charente-Maritime. Comment ne pas saluer au passage les artisans de cette manifestation, ces bénévoles, retraités ou enseignants encore en activité, et au premier rang d’entre eux la libraire qui en est l’âme et la cheville ouvrière : Danielle Gay ? C’est grâce à elle que Je lis mômes existe depuis six ans dans son format actuel. Je ferme la parenthèse.

Yann Fastier, pour en revenir à lui, a réalisé un superbe documentaire sur la Résistance en Limousin, autour de son chef emblématique, le communiste Georges Guingouin. Cet album d’une quarantaine de pages, bien documenté, va à l’essentiel, racontant la progressive montée en puissance des maquisards, de mai 40 à août 44. Sur chaque double page, un fil d’actualité retrace en quelques mots les grandes étapes de la deuxième guerre mondiale. L’histoire locale des résistants limousins s’articule avec la grande histoire en marche, grâce un court récit qui campe tel ou tel aspect de la vie quotidienne et de la lutte au temps de l’occupation allemande. L’album donne même parfois la parole à un collaborateur ou un gendarme agissant pour le compte du régime de Vichy. Les tensions au sein de la Résistance, l’attitude des communistes dont beaucoup furent décontenancés par le pacte germano-soviétique, sont évoqués de façon accessible et synthétique. Sur la page de droite, Yann Fastier a réalisé une superbe illustration pleine page, une linogravure qui fixe de façon dramatique  et épurée le décor de chacune des situations évoquées.

Après les vues vivantes des doubles pages, une annexe reprend un récit plus historiquement ordonné de l’itinéraire de Résistance de Georges Guingouin, jusqu’aux soubresauts de l’après-guerre. En délicatesse avec le parti communiste, Guingouin et certains de ses lieutenants devront affronter en 53-54 une violente cabale et même un procès qui aboutira à un non-lieu. Georges Guingouin pourra reprendre son métier d’instituteur, désormais « éloigné des passions politiciennes », comme le résume Yann Fastier.


Complété par un court lexique, une bibliographie, une filmographie et des adresses de sites Internet, cet album peut constituer, dès les classes primaires, une excellente introduction concrète imagée et documentée, à l’histoire de la Résistance.

Guingouin, un chef du maquis - Yann Fastier - l'Atelier du Poisson Soluble (40 pages, 16 €)

En podcast sur RCF Loiret (écoutez un extrait à 2:37) :

vendredi 9 juin 2017

Roslend (tome 1)


Je vous ai déjà présenté dans mes chroniques du vendredi trois livres qu’on peut ranger à des titres divers dans les rayons de la science-fiction jeunesse française : La maison des reflets, de Camille Brissot, New Earth Project, de David Moitet et le premier volet de la trilogie annoncée de C. Kueva, Les porteurs. Je vous rappelle à cette occasion que vous pouvez retrouver ces chroniques sur le site internet de RCF et les écouter ou les réécouter au moment choisi par vous.

Le livre du jour, intitulé Roslend, de Nathalie Somers, peut rejoindre la même étagère. Il repose sur une thématique classique dans l’univers de la SF, celle des mondes parallèles. Nous sommes à Londres, en septembre 1940, au moment où Hitler essaie de faire plier les Anglais sous les bombes, lesquels Anglais, armés de leur flegme légendaire et guidés par Winston Church, « keep calm and carry on » au milieu des explosions et des incendies. Lucan, 14 ans, est un grand costaud, joueur de hurling, ce « sport gaëlique qui se joue avec une crosse en bois et une balle en cuir » nous précise une note de bas de page. Il n’a qu’un désir : se faire passer pour plus vieux qu’il n’est et s’engager dans la Royal Air Force pour défendre Londres en pilotant un Spitfire. Orphelin, il est élevé par son grand-père, horloger de son état. Et il partage beaucoup de moments de sa vie avec Catriona, un « garçon manqué » de son immeuble, sa sœur de lait, jusqu’ici du moins, c’est-à-dire jusqu’à ce moment où une fille devient une femme et où le garçon s’en aperçoit, avec un petit temps de retard.

Arrive très vite le drame qui va lancer l’intrigue. Le grand-père de Lucan est grièvement blessé lors d’un énième bombardement et il a juste le temps, avant de mourir, de confier à son petit-fils un secret, qui est enfermé dans une horloge de son atelier, une reproduction de Big Ben. Ce secret fait basculer brutalement Lucan dans un monde parallèle, tellement parallèle à celui des Britanniques qu’il est lui aussi en guerre et menacé de destruction totale par un adversaire impitoyable. Dans cet Alter Monde, comme le nomme l’auteure, coexistent plusieurs sociétés, antagonistes ou cachées. Le double de Londres, c’est Roslend, la capitale. C’est là qu’apparaît brutalement Lucan, qui est d’abord pris pour un espion étranger. Sans qu’il sache toujours s’il rêve ou s’il a effectivement franchi la porte d’un autre royaume, Lucan va multiplier les allers-retours entre Londres et Roslend. Des deux côtés, ce pouvoir qu’il a hérité de son grand-père va apparaître comme la marque d’une vertu salvifique détenue par le jeune homme, que chaque camp va vouloir exploiter. A son corps défendant, Lucan va devenir une sorte d’élu sur lequel repose le sort des deux mondes.

Dès l’ouverture de son livre, Nathalie Somers nous entraîne dans l’Alter monde qu’elle a créé de toutes pièces, avant d’y plonger Lucan, et le lecteur avec lui, dans un étonnement de tous les instants. Sous des apparences féodales, moyenâgeuses, c’est à bien des égards une société beaucoup plus avancée que le Londres des années 40. Les forces de l’esprit y ont développé une science bien différente de la nôtre. Ainsi, les avions de guerre sont d’énormes oiseaux d’élevage qui vont exaucer de façon inattendue les rêves de pilote que nourrit Lucan quand il se trouve à Londres. L’auteure balade l’adolescent dans ces deux univers et il va se retrouver propulsé au cœur d’enjeux stratégiques, initié et acteur malgré lui de choses qui le dépassent.

Le roman s’ouvre dans l’Alter monde, au pays de Nelbri, le rival en guerre. Altrïos, un espion de Roslend, est en difficulté...


En podcast sur RCF Loiret (écoutez un extrait à 3:49) :



Roslend (tome 1) - Nathalie Somers - Didier Jeunesse (352 pages, 17 €)

vendredi 2 juin 2017

Le cœur est un muscle fragile


... à tous les âges de la vie.


C’est pour moi la magie principale de la littérature pour la jeunesse : en rejouant pour nous l’enfance, l’adolescence, les premiers émois et les premières fois, elle nous invite à nous rappeler d’où nous venons, à revisiter des séquences de nos vies parfois oubliées et qui pourtant portent, soutiennent, entretiennent le meilleur – je ne dis pas le plus facile - de ce que nous sommes aujourd’hui. Peut-être y a-t-il pour un adulte un plaisir régressif à lire ces livres, mais ils ont aussi le grand intérêt, quand ils sont authentiques, de nous faire entrevoir, de l’intérieur, comment vivent les jeunes aujourd’hui. Un peu de fiction remplace parfois avantageusement beaucoup de sociologie…

Le cœur est un muscle fragile, de Brigitte Smadja, est un de ces livres. Centré sur la personne de Simon, le récit nous raconte la vie d’un garçon du CE1 à la troisième. L’histoire est enchâssée entre un prologue qui nous donne envie de savoir qui est Simon et comment il en est arrivé là, à 15 ans et demi, et un épilogue qui vaut dénouement heureux.

Nous rencontrons Simon à un moment délicat, dont on devine immédiatement la violence. Il vient d’être victime sur Facebook d’un lâchage - pour ne pas dire d’un lynchage - généralisé, au point même que ses deux meilleurs amis, Nessim et Léonard semblent eux aussi sur le point de l’abandonner. Il est désemparé. Comment en est-il arrivé là ? Il y a une histoire de fille, mais ce n’est pas clair. C’est ce que le livre va éclaircir, au prix d’un long retour en arrière, qui ressaisit toute sa vie depuis l’âge de 7 ans et demi.

En ce sens, Le cœur est un muscle fragile, est un vrai roman d’apprentissage. Sur l’amitié, sur le milieu scolaire, les relations avec les parents, sur l’apparition des premières filles dans les radars des garçons et la naissance du sentiment amoureux. Plus subtilement, ce que le roman de Brigitte Smadja s’emploie à cerner et décrire, c’est chez Simon la lente et progressive construction de l’intime et l’énorme effort qu’il doit déployer pour préserver cette vie intérieure contre tous les empiètements du monde extérieur, jeunes et adultes confondus.

Dans cette construction de son for intérieur, et sans qu’il en soit réellement conscient, Simon va trouver un appui épisodique mais puissant auprès d’une grand-mère, refuge hors normes, qui vit en Normandie et a la passion des nuages. Du coup, le ciel a beaucoup d’importance dans la vie de Simon. Simon est dans les nuages. C’est la faute – ou la grâce – de Nine, qui ne se sépare jamais de son appareil et les photographie sans cesse en couleurs, en noir et blanc. De Nine, Simon, photographe lui aussi, tient donc ce regard affûté qui n’ignore rien du monde visible parce qu’il guette sans cesse les formes fugitives qui se dessinent dans le ciel. Brigitte Smadja rythme d’ailleurs ses chapitres avec des titres qui sont autant de considérations célestes : Ciel bleu limpide, miraculeux ; ciel perturbé électrique ; nuits blanches ; faut quitter les nuages.

Arrive bien sûr le moment où les filles deviennent la grande affaire des garçons. Qu’en pensent-ils exactement des filles, les garçons ? Elles se sont transformées trop vite pour eux.  Simon s’étonne quand il revoit Assia : il est « abasourdi par ce changement » (118). Son copain Nessim confirme : « les filles, elles changent si souvent que tu sais jamais à qui t’as affaire ». Puis, un peu plus loin, « les filles, faut pas chercher à les comprendre ». En fait « les filles sont comme ça » (97). Léonard qui a conquis la belle Assia n’est sûr de rien au point de demander à Simon : « j’arrive pas à comprendre si on est ensemble ou si on n’est pas ensemble. Tu dirais quoi, toi ? » (95) mais la question essentielle avec les filles est peut-être : « qu’est-ce qui les fait rire ? » (45). Alors Assia, Hortense, Bérengère, Thelma, Dune, Charlotte, qui êtes-vous ?


Brigitte Smadja épouse ces transformations et ces interrogations avec empathie et justesse. Elle compose d’ailleurs une scène stupéfiante de vérité entre Simon et Charlotte, la petite sœur de Léonard dont on devine qu’amoureuse de l’ami de son frère, elle est déjà prête à se jeter à son cou. (219 – 221) Le cœur est un muscle fragile effleure l’enfance et l’adolescence avec un mélange étonnant d’acuité et de tendresse, de pudeur et de drôlerie émue. Nous ne savons plus comment les ados vivent, ni dans quel monde, qui n’est plus le nôtre depuis longtemps. Brigitte Smadja, qui est aussi enseignante et vit à leur contact, semble avoir un sixième sens pour nous les faire redécouvrir.

Le coeur est un muscle fragile - Brigitte Smadja - l'école des loisirs (256 pages, 15,80 €)

En podcast sur RCF Loiret :

Les étincelles invisibles

  Nous sommes à Juniper, un petit village écossais proche d’Edimbourg. Adeline, dite Addie, a 11 ans et deux sœurs jumelles plus grandes, Ni...