Mon papa ne sait pas lire ?!
Le monde de l’édition pour la jeunesse française est très
riche, même si ses autrices et auteurs sont loin de l’être tous. A côté des
poids lourds du secteur, une multitude de petits éditeurs cherchent et trouvent
leur place auprès des auteur·e·s et, plus péniblement, sur les tables surencombrées
des libraires. Kilowatt est un de
ceux-là, aux côtés par exemple du
Muscadier. Ces éditeurs proposent fréquemment à leurs lecteurs une
littérature engagée. D’aucuns pourraient, à juste titre parfois, redouter de voir
paraître, sous cette appellation, des livres dégoulinants de bons sentiments et
d’intentions politiques naïves, où l’ambition littéraire serait sacrifiée à
quelque message à transmettre à la jeunesse.
Les livres d’Yves-Marie Clément échappent, me semble-t-il, à
cet écueil, combinant style, lisibilité et cette forme d’engagement qui ne
trompe pas quand il est aussi, hors écriture, celui d’une vie. Ainsi, Kilowatt,
l’éditeur mentionné, a publié récemment Ni
lire, ni écrire, un petit récit de 41 pages, lisible à partir de 7/8 ans,
annonce la 4ème de couverture.
Zoé vient tout juste d’apprendre à lire quand elle s’aperçoit
d’une chose étonnante que son papa avait
réussi à lui cacher jusqu’ici : il ne sait ni lire, ni écrire, d’où le
titre du livre, qui n’est pas une revendication, mais le constat d’un fait
social bien réel.
Dans notre pays, on estime que 5 % de la population
ayant été scolarisée en langue française, en France ou à l’étranger, est
illettrée. Dans les études sur le sujet, l’analphabète est celui qui n’a jamais appris à lire ni à écrire, cas rarissime chez nous, alors
que l’illettré est celui qui a appris, souvent mal, et qui a
« oublié », la plupart du temps à la suite d’un parcours de vie
difficile qui a pesé d’abord sur sa scolarité. De ce fait, il éprouve des
difficultés à lire, qu’il vit comme insurmontables, et dans la gêne et la honte
quand, arrivé à l’âge adulte, il n’arrive plus à masquer son handicap.
Zoé se fiche évidemment des statistiques. La révélation, dans
les circonstances que l’on va voir, que son super papa à elle ne sait pas lire,
la submerge d’une émotion incontrôlable. Cela lui semble à peine possible et à
peine croyable. Comment s’en sortir ? On ne racontera pas ici comment Yves-Marie
Clément dénoue la chose. Son récit se joue à deux voix alternées, celle de Zoé
et celle de Cédric, le papa, mis en quelque sorte au pied du mur par le
cheminement scolaire de sa fille.
Et c’est dans une librairie où Zoé traîne son papa, très
réticent, que le mur va se présenter… (extrait lu à 2:55)
Ni lire, ni écrire ! - Yves-Marie Clément - Kilowatt éditions (48 pages, 7,30 €)
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