Quand ce récit commence, Gwenaëlle dite Gwen, 17 ans, est
dans la clinique du bien nommé Dr Lacasse pour ramasser les morceaux de son
petit moi éclaté par terre et pour essayer de les recoller. Elle est bien
persuadée qu’elle va y arriver toute seule, parce qu’elle est bien incapable de
s’imaginer autrement que toute seule, au fond du trou qu’elle s’est creusée
elle-même. Les amies ont disparu, ne restent que les parents, qui manifestent à
chacune de leurs visites combien ils sont, eux aussi, malheureux et incapables
de comprendre le geste de leur fille.
Les raisons de sa présence entre quatre murs blancs
capitonnés tiennent en effet en deux lettres : TS. Les raisons de sa TS
tiennent en une seule initiale, W, W pour William, le beau gosse du lycée dont
elle s’est entichée au point qu’il tenait son existence entière entre ses
mains. Le jour où il l’a lâchée, Gwen est tombée de très haut, très fort et il
n’y avait plus rien ni personne autour d’elle pour la rattraper, tant William
avait fait le vide autour de celle qui croyait être aimée absolument,
inconditionnellement et pour toujours.
Dans sa clinique, Gwen commence à se souvenir et elle écrit,
et le carnet qu’elle remplit de son histoire se fait livre sous nos yeux de
lecteur. Le problème, c’est que se rappeler qu’on a été aimée, l’écrire, c’est
continuer à penser, envers et contre tout et tous, qu’on l’est encore.
Le chemin est donc long pour Gwen, entre ses griffonnages
journaliers et ses rencontres régulières avec le Dr Lacasse, à qui elle ne veut
rien dire et dont elle ne veut rien entendre. Jusqu’au jour où…
L’Orléanaise Gwladys Constant nous conte de façon très
réaliste l’histoire de l’emprise progressive et irrésistible d’un garçon sur
une fille ni plus bête ni plus naïve qu’une autre. On pense évidemment au
modèle du « pervers narcissique », très à la mode. Donnant la parole
à sa narratrice, notre autrice s’interdit tout commentaire
« surplombant ». Les amies, Lucile, rencontrée à la clinique, Claire,
que William, horrifié en apprenant qu’elle était lesbienne, lui avait fait
rejeter comme d’ailleurs ses autres amies du lycée, et bien sûr le Dr Lacasse,
offrent au récit de Gwen des échappées, des trouées de lumière, évitant qu’il
ne se réduise à un monologue trop obscur et étouffant.
Avec ce livre, Gwladys Constant fait peut-être mentir
Marguerite Duras qui affirmait que « l’écriture ne sauve de rien ». Car
c’est bien notamment en écrivant que Gwen remonte peu à peu à la surface de sa
vie.
Pour écouter cette chronique (extrait lu à 2:35) :
Pour écouter cette chronique (extrait lu à 2:35) :
Passionnément, à ma folie - Gwladys Constant - éditions du Rouergue, collection
doado (207 pages, 13,20 €)
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