« Je crois que chacun ici-bas à un talent ». C’est sur ce credo sommaire mais résolu que Miss Rodgers, l’institutrice de Simon Green, invite son jeune élève à voler de ses propres ailes. Simon n’est manifestement pas fait pour l’école et depuis que son oncle et sa tante l’ont recueilli, on fait sentir au garçon, qui a bon appétit, qu’il mange une bonne part de ce qui reviendrait normalement à ses quatre cousins.
Voler de ses propres ailes ? Pourquoi pas en compagnie de ce troupeau de mille dindes qui coûtent plus cher à nourrir à leur actuel propriétaire qu’elles ne lui rapporteront. Sauf si le jeune Simon les conduit du Missouri au Colorado, jusqu’à Denver exactement, à mille kilomètres de là, où il pourra les revendre 20 fois leur prix. Mais le fermier, Mr Buffey, n’est pas prêt à prendre le risque de confier son trésor sur pattes à un gamin inexpérimenté.
C’est pourtant le projet un peu fou qui va s’imposer à Simon pour se lancer dans la vie. Miss Rodgers, décidément sa bonne fée, lui prête toutes ses économies pour lui permettre d’acheter le troupeau. Simon recrute un muletier qu’il convainc non sans mal de lâcher la bouteille. Bidwell Peece conduira les quatre mules que Simon a élevées et qui tirent un chariot de maïs, de quoi nourrir les dindes en route pendant que Simon et Emmett, le petit chien du muletier, encadreront les volatiles. Et les voilà partis.
En chemin, le convoi va croiser la route de Jo, esclave en fuite et celle de quelques indiens que Simon devra amadouer. Pourra-t-il faire confiance à son père qui retrouve sa trace ? Pas sûr. D’un nuage de sauterelles, Simon sauvera Lizzie, s’adjoignant ainsi une autre compagne à peine plus âgée que lui.
Du roman de Kathleen Karr, le talent de Léonie Bischoff a tiré une BD enlevée qui nous transporte dans cette Amérique du XIXème siècle prête à toutes les aventures et à toutes les entreprises, car personne n’a rien à perdre mais tout à gagner. L’enthousiasme juvénile et communicatif de notre dinde-boy et de son troupeau emporte tout sur son passage. Bien sûr, il y aura quelques déboires en route, de l’adversité même, mais l’équipe hétéroclite que Simon a formée au fil du voyage saura unir les talents exaltés par Miss Rodgers pour résister à toutes les péripéties qui accompagnent nécessairement un tel périple.
Pour écouter cette chronique :
La longue marche des dindes est une bande dessinée de Léonie Bischoff, d’après le roman de Kathleen Karr ; éditée par Rue de Sèvres (145 pages, 18 €)
Cette BD, primée à Angoulême, avait déjà reçu au dernier Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil le prix 2022 de l’ACBD, l'association des critiques de bande dessinée.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire