L’avantage, avec la littérature pour la jeunesse, bien des
auteurs vous le diront, c’est que les livres ne disparaissent pas du jour au
lendemain des rayonnages des libraires. Jean Delas, l’un des confondateurs de
l’école des loisirs, aime à répéter qu’il n’édite pas des best-sellers mais des
long-sellers, des titres qui restent au catalogue et qui se vendent sur 5, 10
parfois 20 ans. C’est particulièrement vrai dans le cas des albums. Car il
n’est pas rare que des jeunes parents rachètent à leurs enfants ceux qui les
ont bercés quand ils étaient eux-mêmes tout-petits. Mais c’est aussi vrai pour
certains livres destinés aux premiers lecteurs voire aux adolescents.
***
Comme c’est la rentrée des KT et des aumôneries, je veux vous
parler d’un de ces « long-sellers ». Publié par Bayard il y aura
bientôt vingt ans, Jésus comme un roman
est le résultat d’une commande passée par l’éditeur catholique à Marie-Aude
Murail, l’auteur pour la jeunesse bien connue. A l’époque, Bayard souhaitait offrir
aux jeunes lecteurs quelque chose qui n’existait pas : une sorte de
biographie de Jésus destinée à ceux qui, vierges de toute éducation ou
culture religieuse, ne savent strictement rien du fondateur du christianisme. Nous
en croisons tous les jours. Marie-Aude Murail a relevé le défi, constatant
d’emblée que les quatre évangiles, « avec leur narration en patchwork,
leurs nombreux personnages et un contexte historique mal connu sont d’une
lecture peu accessible aux jeunes d’aujourd’hui. »
Après quelques essais et tâtonnements, l’auteure a décidé,
plutôt que de raconter une énième « vie de Jésus », de plonger le
jeune lecteur dans un récit d’aventures qui commencerait par où les évangiles
se terminent, à la manière d’un roman policier construit en flashback :
« un cadavre a disparu, qu’en ont-ils fait ? ». Tout en restant
au plus près du texte des Ecritures, elle a choisi l’apôtre Pierre comme
narrateur de cette histoire. C’est donc un récit inédit au « je »,
l’écrivaine s’étant glissée dans la peau du plus tourmenté des disciples. En 22
courts chapitres tendus, conclus par un épilogue, nous suivons Pierre sur les
clairs chemins de Galilée, du premier qui s’intitule Disparu ! au dernier : Vivant.
Au moment de la sortie de son livre, Marie-Aude Murail a
raconté à France Inter les circonstances particulières dans lesquelles elle
avait composé cette histoire : « Je l’ai d’abord écrite,
disait-elle, parce que ma mère était en train de mourir et que j’avais besoin
de m’entendre dire : « N’aie pas peur ». Je l’ai écrite aussi parce que les
enfants, mes enfants, nos enfants, peuvent à leur tour avoir besoin un jour que
quelqu’un, sur la route, les accompagne et leur redise les mots d’amour d’un
certain Jésus. Si ce quelqu’un, c’était moi, je n’aurais pas été écrivain
jeunesse pour rien. »
Dès sa sortie, Jésus
comme un roman a reçu le prix jeunesse 1998 du syndicat des libraires de
littérature religieuse. Il a été traduit en allemand, en espagnol, en
néerlandais et en italien.
Maintenant, je vous propose d’écouter Pierre. Il est chez
lui, prostré, quand Jean entre brusquement. Nous sommes au matin de la
résurrection, mais ni Pierre ni Jean ne le savent encore et notre jeune lecteur
non plus :
(l'extrait lu est à 3:09)
(l'extrait lu est à 3:09)
Jésus, comme un roman - Marie-Aude Murail - Bayard (133 pages, 10,90 €)
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