vendredi 10 février 2017

Strada Zambila


De ses neuf années passées à Bucarest, documentaliste au lycée français Anna de Noailles, Fanny Chartres a rapporté un bien joli souvenir, une façon pour elle de dire au revoir  à ce pays : Strada Zambila, qui vient de paraître à l’école des loisirs, est le récit d’un moment d’enfance dans la Roumanie d’aujourd’hui.

Soit deux sœurs très liées – tiens, tiens, Fanny aurait-elle pensé à Marie, la sœur inséparable et dédicataire de son premier livre ?  – Ilinca et Zoé. Leurs parents sont partis en France et les ont confiées aux grands-parents, Bunicu et Bunica, qui, pour la circonstance, sont venus occuper le minuscule appartement de la famille avec leurs huit chats. Sans sa petite sœur feu-follet, Ilinca déprimerait durement. Elle n’arrive pas à comprendre le choix de ses parents, qui a déstabilisé la vie familiale. En Roumanie, ceux qui s’en vont à l’étranger dans l’espoir d’une vie meilleure sont appelés les « cueilleurs de fraises », à l’image de tous ceux qui partent chaque année faire la récolte en Espagne. Mais le père est médecin : même s’il gagne davantage d’argent en Normandie, Ilinca refuse de se rendre à ces raisons purement matérielles. Même si ses grands-parents sont très gentils, même si c’est parfois bien utile d’avoir un grand-père chauffeur de taxi, non décidément, rien n’est plus comme avant.

Presque tous les soirs, parents et enfants se retrouvent pourtant sur Skype. Mais quand l’écran s’éteint la frustration revient, à moins que cette façon de communiquer ne la développe. Un soir, Ilinca claque méchamment le clapet à ses parents en fermant brutalement la session en cours. Elle boude pendant plusieurs jours.

Pourtant la vie continue. Avec la perspective d’un nouveau travail scolaire qui va marier la passion d’Ilinca pour la photographie et celle d’un certain Florin pour les mots et la poésie, une forme d’apaisement se fait jour. Nous visitons le Bucarest insolite à la suite du jeune couple qui se forme timidement.

Mais de nouveaux nuages arrivent à l’horizon. Car Florin est un Rom et les Roms en Roumanie ne sont pas plus chez eux que chez nous, victimes du même ostracisme. Florin est bien accueilli par les grands-parents, comme Ilinca l’est par la mère de Florin, qui est fleuriste. Ilinca rapporte de temps en temps un bouquet chez elle. Mais l’homme de la rue n’est pas tendre avec ceux dont les traits et la peau plus sombre trahissent les origines.

Est-ce qu’Ilinca a pressenti dès le début que le départ de ses parents n’était pas normal, qu’il cachait quelque chose ? Après un bref retour de la maman à Bucarest, pour les fêtes de Noël, arraché par Ilinca, celle-ci va surprendre un terrible secret sur la messagerie de son grand-père…


Le livre de Fanny Chartres nous emmène dans un pays peu connu, qui s’est relevé progressivement après le renversement de la dictature des Ceaucescu fin 89.  Elle nous le rend attachant et ce n’est pas le moindre mérite de Strada Zambila, qui est le nom de la rue où habite notre héroïne.

Strada Zambila - Fanny Chartres - l'école des loisirs (210 pages, 9,50 €)

Podcast sur RCF Loiret (écoutez un extrait du livre à 2:47) :

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