vendredi 16 mars 2018

Frères d'exil



Quelque part dans le Pacifique, une petite île s’enfonce lentement et inexorablement dans l’océan, pour des raisons mystérieuses mais qu’on devine liées au changement climatique. Le sauvetage de la population a été organisé, de grands paquebots vont venir chercher les milliers d’insulaires menacés, pour les conduire en lieu sûr, vers une terre ferme.

Nani, une fille de huit ans, est entraînée jusqu’au port par son père et sa mère, Janek et Youmi. Son grand-père, qu’elle nomme Ipa comme tous les grands-pères de son île, invalide, a choisi de rester avec Moo, sa femme. Mais, avant qu’elle ne le quitte, il fait à sa petite-fille trois cadeaux, autant de précieux viatiques qui vont l’accompagner et lui permettre d’affronter le voyage périlleux qui s’annonce, cet exode vers un avenir ignoré.

En trois temps, Kochka, l’autrice de Frères d’exil nous confronte aux bouleversements de toutes ces vies, vues à hauteur d’un jeune être qui peut encore ignorer la méchanceté du monde. 

C’est d’abord un sauve-qui-peut général jetant tous les insulaires, hommes, femmes et enfants sur les routes qui conduisent à l’unique port, sous une tempête tropicale indescriptible. Sur les quais, la crainte de ne pouvoir embarquer entraîne de nouvelles scènes de panique, dont Janek arrive à préserver sa famille mais qui n’épargne pas le grand-père de Semeio, tué dans une bousculade. Youmi et Janek vont recueillir sans hésiter cet orphelin et le prendre avec eux. La traversée est un moment de suspens et de brève résilience, entre nostalgie et crainte de l’avenir. Nani et Semeio font connaissance sur le bateau. L’arrivée sur le continent, dans un froid inconnu, l’accueil des réfugiés entassés dans de grands hangars, le tri vers des destinations improbables sera le troisième temps de cette odyssée.

Dédié « à tous mes frères », le livre de Kochka est un livre fraternel, à l’image du monde des hommes qu’elle décrit, un monde tel qu’il devrait être. Kochka dresse son utopie comme un rempart face au malheur qui déferle. Les illustrations de Tom Haugomat, claires et dépouillées, semblent conforter l’optimisme volontaire du propos. Cette utopie n’est pas autre chose que la somme indénombrable des bonnes volontés conquises jour après jour sur les égoïsmes naturels.

Écouter cette chronique (extrait lu à 2:20) :

Frères d’exil – Kochka – Flammarion jeunesse (155 pages, 12 €)

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