Ne cherchez pas la Draïna sur un atlas. Même en fouillant la mosaïque des Balkans, vous ne la trouverez pas davantage que les lecteurs de Tintin qui tentèrent de situer sur une carte la Syldavie de Georges Rémi. C’est pourtant en Draïna que Yann Fastier nous emmène pour suivre le destin d’Ana, petite orpheline élevée par sa grand-mère, en butte toutes les deux à l’hostilité sourde des gens de leur village, pour des raisons inexpliquées.
Quand la grand-mère meurt, Ana se retrouve brutalement seule. Elle a dix ans et plus personne ne la protège. Retrouvant un jour sa maison pillée et se sentant menacée, elle décide de partir droit devant elle avec pour tout compagnon un livre du XVIIIe siècle écrit en français, langue que sa grand-mère lui a enseignée.
Elle arrive dans un port de l’Adriatique où elle n’a rapidement pas d’autre choix pour survivre que d’intégrer les rangs d’une bande d’enfants sans famille qui vont lui enseigner l’art de détrousser les habitants. C’est un touriste français qu’elle vient de délester de son portefeuille, un vieux savant, un peu éberlué d’entendre une gamine des rues pratiquer sa langue avec deux siècles de retard, qui va l’arracher providentiellement à la misère et lui faire découvrir la France. Adoptée par le couple de son bienfaiteur, Ana grandit, devient une jeune fille éduquée et savante. Elle tombe amoureuse et son avenir semble tracé mais ses parents adoptifs meurent accidentellement, du moins en apparence, jusqu’à ce qu’une enquête accuse Ana et qu’elle soit jetée en prison.
Dès lors, la jeune fille va se retrouver entourée de conspirateurs, d’espions, et de révolutionnaires. Pourquoi est-elle menacée de mort, qui donc est-elle vraiment pour que sa personne même devienne l’enjeu de luttes et de complots politiques qui vont la ramener dans sa Draïna natale ? C’est ce qu’elle va comprendre peu à peu, cherchant à maîtriser un destin qui lui échappe au fur et à mesure qu’il lui est dévoilé et, avec lui, les passions multiples qui l’animent.
Le livre est en trois parties, comme autant d’époques de la vie d’Ana. Entre les sombres dystopies et les tranches de vie adolescentes, il n’y a plus beaucoup de place dans la production éditoriale contemporaine pour les romans d’aventures « à l’ancienne ». Le renard et la couronne renoue brillamment avec cette veine, riche de voyages, de mystères et de rebondissements, qui offre aux lecteurs et lectrices cette part de rêverie et de dépaysement qu’iels attendent toujours. Et au passage - ce n’est pas le moindre mérite de ce roman - Yann Fastier brosse un très beau portrait d’héroïne, libre de toutes sortes de façons, portrait qui a trouvé naturellement sa place chez l’éditeur Talents Hauts.
Écouter cette chronique (extrait lu à 2:40) :
Écouter cette chronique (extrait lu à 2:40) :
Le renard et la couronne – Yann Fastier – Talents Hauts – 2018 (541 pages, 16,00 €)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire