vendredi 16 avril 2021

Boucles de pierre

 


« On y voit aussi des statues
Qui se tiennent tranquilles tout le jour, dit-on
Mais moi, je sais que, dès la nuit venue,
Elles s'en vont danser sur le gazon. ♫ »


Non, vous ne vous êtes pas trompé d’émission, ni d’époque et sans savoir qui vous êtes, je suis quasi-certain qu’en dépit de la médiocrité de l’interprétation, vous avez reconnu à ces quelques mesures Le jardin extraordinaire, chanson de Charles Trenet. Tout ça pour vous introduire dans un autre jardin, celui que Clémentine Beauvais a proposé aux pinceaux de l’illustrateur Max Ducos. Boucles de pierre, c’est le nom de son nouvel album, conte la traversée quotidienne d’un jardin public par une jeune ado qui rend visite à son oncle malade. En chemin, elle croise toutes sortes de statues qui se tiennent tranquilles, effectivement. Mais au fil des jours qui deviennent des semaines, des mois et bientôt quatre saisons, notre fidèle nièce, qui continue à se rendre chez son tonton, un solide rouquin qui lit Brexit Romance, constate une bien étrange transformation : les cheveux des statues poussent, oui, vous avez bien entendu et pas seulement les cheveux, mais aussi les poils des barbes, les poils des aisselles, les poils des… je m’arrête là, car vous l’avez compris, c’est un livre pour les enfants. Quoiqu’écrit par Clémentine Beauvais, il ne fait donc pas, Dieu merci, l’inventaire exhaustif de nos pilosités.

Max Ducos, lui, est bordelais. Si vous avez visité Bordeaux ou, mieux, si vous y habitez comme lui, vous reconnaîtrez sûrement dans ses splendides illustrations pleine page le décor du Jardin public, qui fut transformé en parc à l’anglaise sous le Second empire. L’œil se promène paisiblement sur cette nature grand format qui s’est invitée en pleine ville pour le plus grand bonheur des enfants, des pigeons et des mères de famille qui fréquentent ses allées. Peut-être même retrouverez-vous avec délices teintées de nostalgie cette époque où l’on se promenait nous aussi sans masques, visage nu, où l’on pouvait flâner sans autorisation de sortie...

Ah, il faut que je vous donne des nouvelles du tonton. Clémentine Beauvais aime les fins heureuses. Normalement. Au final, il va beaucoup mieux. Dès qu’il sera sur pied, ne vous inquiétez pas, tout rentrera dans l’ordre dans ce jardin (un peu) extraordinaire.


Ah, pour terminer, je ne peux pas m’empêcher de vous conseiller un autre album sur le même thème. Si, après avoir lu Boucles de pierre, la vie nocturne des statues dans les jardins intéresse votre enfant, vous pourrez aussi lui offrir Juste une seconde !, un album de Michel Gay publié il y aura bientôt vingt-cinq ans et toujours au catalogue de l’école des loisirs. Je le lisais à ma fille Constance quand nous sommes arrivés à Bordeaux l’année de sa parution (de l’album, ma fille, elle, était apparue deux ans plus tôt). Bref, je ne vais pas vous raconter ma vie. Sachez seulement qu’on y voit aussi des statues qui, la nuit, s’en vont danser sur le gazon, parsemé de nymphes nues et de cupidons guère plus habillés. Et c’est toujours un délicat album pour les enfants.


Et pendant qu'on est dans les jardins extraordinaires, allez donc voir aussi celui d'Yvan Pommaux, présenté ici même : Puisque c'est ça, je pars !



***

Pour écouter cette chronique (extrait lu à 03:16) :

Boucles de pierre, album grand format de Clémentine Beauvais, illustré par Max Ducos -  Sarbacane - 2021 (32 pages, 16,50 €). À partir de 5 ans.


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