vendredi 3 mars 2017

George


Nous sommes en Amérique. George, sans « s », est en CM1. Elle a un frère aîné, Scott, qui est en seconde au lycée. Et puis une maman. Le papa, lui, est parti. Au fait, j’aurais pu commencer cette chronique autrement : Scott est en seconde au lycée et il a un petit frère prénommé George, sans « s », qui est en CM1, papa a refait sa vie, maman est restée avec ses garçons. Là vous m’auriez dit : ah, ce n’est pas la même histoire. Eh bien si, c’est la même histoire. Et elle continue avec celle qui est la meilleure amie de George, Kelly. Car George n’aime pas trop les garçons et ils lui rendent bien, surtout Jeff et Rick, les deux durs de la classe de Mademoiselle Udell. Peut-être commencez-vous à comprendre que George a un secret bien gardé, qui pousse en lui mais qu’elle voudrait pouvoir partager désormais. Mais avec qui ? Comment dire aux autres que vous n’êtes pas ce qu’ils croient depuis toujours que vous êtes ? Et à quels autres ? Maman ? Elle connaît George comme si elle l’avait fait. Scott ? Même si les deux frères se retrouvent encore autour d’un écran, manettes en main, pour défier Mario, quelque chose a changé entre eux. Alors Kelly ?

Oui, Kelly. C’est une fille, une vraie, et donc la seule à pouvoir comprendre le problème de son ami George. Mais il y a des choses qu’on ne peut pas avouer comme ça, tellement elles sembleraient incroyables. Les gens veulent des preuves, même votre meilleure amie, et certaines évidences sont parfois contre vous. Pour l’heure, George est la seule à savoir qui elle est vraiment. Elle, vraiment ? Justement, Mademoiselle Udell s’apprête à distribuer les rôles d’une pièce de théâtre entre les garçons et les filles de sa classe. Or jouer un rôle, c’est faire semblant, et tout le monde peut faire semblant d’être n’importe qui, non ? Pourquoi George n’en profiterait pas pour faire semblant d’être une fille et suggérer aux autres ce qui est devenu son évidence intérieure ? Peut-être que les choses, après, seraient plus simples…


George est le roman d’une lente démonstration, peut-être la plus difficile qui soit pour un être humain, quand la nature vous a assigné un sexe qui n’est pas le vôtre, celui que vous éprouvez dans ce corps vécu que les phénoménologues nomment la chair. George est donc le premier roman d’un auteur américain, transgenre comme on dit désormais, Alex Gino. Et c’est un tour de force tranquille d’avoir su trouver les mots pour frayer à George un passage de l’intime à la lumière et d’avoir fait ce roman témoignage, grave et léger, que tout le monde peut lire et que grands et petits pourront partager, à l’écoute d’un mystère inouï.

George - Alex Gino - l'école des loisirs (176 pages, 14,50 €)

En podcast sur RCF Loiret (écoutez un extrait du livre à 2:41) :

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